OneLab ep.2 - Le Hub : Borne d'abondance

OneLab ep.2 - Le Hub : Borne d'abondance

Ceci est une histoire vraie, qui n’est pas encore arrivée.

Bienvenue dans ce deuxième épisode de la saison 2 de OneLab. Tu embarques ici dans un voyage imaginaire en audio. Les évènements se déroulent dans le futur, sur un oasis qu’on appelle OneLab qui fait 200, 2000 ou 20 ou 2 hectares selon les visions.

Les épisodes se consultent de préférence dans l’ordre.
Je te souhaite une bonne écoute ! Et à toi de jouer ;-)

N’oublie pas que le meilleur moyen de prédire l’avenir est encore de le créer.

PSsT : Si tu te le demande, les images c’est cadeau, elle n’apportent rien à l’histoire. Celles ci ont été tournées dans les Alpes cet hiver.


L’hiver commence fort cette année, 20 centimètres de neige viennent de tomber. C’est toujours la même joie de se réveiller dans ce paysage blanc immaculé. Il me semble impossible qu’un jour je sois blasé face au spectacle d’une nature enneigée.

J’ai déjà vécu une révolution solaire complète dans cette maison et ses promesses de confort ne m’ont pas déçu. L’hiver dernier, nous avons passé 10 jours d’affilée privés de la bénédiction du soleil. La température chez moi n’est pas descendue en dessous de 19° la journée. Ma maison est dépendante de cette énergie d’amour dispensée inlassablement chaque jour. Le soleil réchauffe sans compter mon cœur, ma maison, l’eau et se transforme en fée électricité. Mon chez-moi sait comment stocker cette énergie. Lorsque les nuages s’installent entre lui et le soleil, les batteries électriques et caloriques prennent le relai pour diffuser électricité et chaleur.

Ma vie de nomade m’a permis de faire la différence entre ce qui est essentiel, important, superflu et encombrant. J’adore prendre des longues douches par exemple, pourtant je n’en ai pas chez moi.

Si j’étais une douche et que mon kiff ultime c'est d'être utilisée alors je serais bien triste dans une maison isolée. On ne m’utiliserait que 15 minutes par jour, quel ennui ! La présence d’une douche dans un logement implique plein de choses : avoir de l’eau chaude sous pression, gérer l’évacuation et le traitement de l’eau, s’assurer que l’humidité ne reste pas à l’intérieur, etc.

En informatique, lorsque le même problème se présente à plusieurs endroits, au lieu de recoder la roue à chaque fois on encapsule la solution dans une fonction. Ainsi au lieu de dupliquer les lignes de code (ou les douches), on les écrit avec grand soin une bonne fois pour toutes à un seul endroit.

En s’y mettant à plusieurs, ce n’est pas un bloc sanitaire extérieur que nous avons bâti, mais un espace bien-être de luxe avec douches, hammam, sauna. Rien à voir avec un vestiaire de foot en agglos empilés, c’est un lieu magnifiquement décoré, avec une incroyable acoustique. Ceux qui aiment chanter ont baptisé les toilettes avec le doux nom de : « Cacathédrale ». Cette salle de bain hors normes est disponible à volonté pour moi, pour tous les voisins et chaque pèlerins.

Dans le paradigme classique de la maison familiale, chaque matin c’est la queue pour prendre une douche en speed avant d’aller travailler ou étudier. Ici à OneLab, la plupart des habitants ont abandonné ce style de vie chronomilimétré pour adopter l’instant présent. Le seul bon moment pour prendre une douche est lorsqu’on a réellement envie d’en prendre une. En gros, tout ça pour dire que je n’ai encore jamais fait la queue pour me laver.

En parallèle de la construction de mon chez-moi, nous avons conçu avec un groupe d’amis ce Hub qui n’accueille pas seulement des douches. La langue française manque malheureusement d’une traduction pour ce petit mot de trois lettres qui en raconte tant.

Le Hub est au centre notre petit groupe de voisines et de voisins. De chez moi, il faut marcher à peu près 100 mètres sous les châtaigniers pour y accéder. D’ailleurs allons-y ! Je dois me recharger en eau filtrée et rapporter des chaises que j’avais empruntées.

Dans la neige, il n’y a aucune trace sinon celle d’un lièvre qui n’avait pas l’air très pressé. J’adore l’acoustique des paysages enneigés lorsque tous les bruits sont feutrés. En arrivant au Hub j’aperçois un groupe de voisins d’une moyenne d’âge de 10 ans. La neige a déployé son argumentaire pour faire sortir les enfants des chaumières.

Une femme sort tout juste de son camion garé à proximité du hub pour la saison. La tasse qu’elle tient dans sa main me laisse supposer un projet de tisane, je lui demande si je peux m’y joindre.Nous avons des passionnés d’herbes aromatiques dans le « quartier ». Il y a beaucoup de choix, beaucoup trop pour moi en fait, si bien que je finis par en sélectionner une au pif. L’un des habitants vient d’installer un appareil de son invention qui maintient constamment 3 litres d’eau proche de l’ébullition. C'est hyper pratique, une seconde et demi plus tard ma boisson est déjà en train d’infuser.

Je demande à ma co-tisanière comment s’est passée la nuit en camion sous la neige. Elle me répond qu’elle a kiffé. Ancienne citadine, elle vit sa première saison en pleine nature. L’inconfort délibérément choisi est pour elle une grande source de satisfaction. Elle se sent vivante comme jamais. Oh je la comprends tellement ! Même si, de mon côté, j’explore un mouvement inverse de retour au confort, je reconnais que sa nouvelle vie semble avoir une saveur bien plus plus subtile que la précédente tiède et molle vendue sur M6.

Le temps de partager cette tisane, ma jarre de 10 litres d’eau dynamisée était remplie. Le filtre à eau est l’un des premiers équipements installés au Hub. La vie et l’eau sont deux concepts jumeaux. Ici c’est un endroit partagé qui n’appartient à personne en particulier. Tout ce qu’on y trouve est disponible sans condition à tout membre de la communauté des humains.

Le Hub a pour rôle principal d’ordonner de façon logique et pratique les flux nécessaires au confort de chacun de passage par ici. On peut le voir comme la borne service d’un camping, à la différence que c’est gratuit. Le Hub capture l’énergie du soleil puis la transforme en électricité et en eau chaude. Il récolte l’eau qui (selon son emplacement) tombe du ciel, coule dans une rivière ou patiente dans une nappe phréatique. Une pompe la met en pression, pour qu’elle circule vers sa destination.

Ce lieu facilite la distribution de l’abondance naturelle et propose également d’autres services comme un espace pour cuisiner et stocker des aliments au frais ; un autre pour la machine à laver et les outils partagés. Il y a également une petite salle commune multifonctions avec un dortoir pour les amis ou les randonneurs à la belle saison.

La semaine dernière, on a eu une petite surprise un (ou une) inconnue a déposé un vidéo-projecteur à l’entrée. J’ai toujours rêvé de vivre une séance de ciné avec un entracte gouter partagé au milieu du film. Si je ne suis pas encore certain que ce soit une bonne idée, j’attendrais d’avoir avoir testé pour conclure.

Ce hub est le premier de son genre mais il a déjà fait des petits un peu partout. Il y a une telle somme d’intelligence collective dans ce lieu, c’est vraiment agréable à observer. Rien n’est figé, tout reste à optimiser. L’idée partagée par ceux qui continuent de l’améliorer est de diffuser les plans à mesure en open source pour que des hubs fleurissent un peu partout.

J’imagine très bien dans plusieurs années vivre dans un monde où tous les 20/30 kilomètres nous trouverons des bornes d’abondance ouvertes et gratuites pour se recharger en eau, en énergie. Des lieux pratiques et accessibles pour prendre soin de soi, qui auront de surcroit la magnifique tendance de provoquer des rencontres inattendues.

On considère ici que tout le monde est de passage, que ce soit pour quelques jours, quelques semaines, quelque mois, plusieurs années ou décennies. Une règle tacite à OneLab veut que tout ce qui est ancré dans le sol soit du domaine commun. Les hubs en font partie, d’ici quelques années on ne se souviendra même plus qui les ont construits ou financés.

Des habitats légers ont poussé où migré de façon libre un peu partout sur le domaine. La plupart du temps une cohésion se forme naturellement et certains choisissent de s’organiser autour de besoins communs. La nature est fractale, lorsqu’on laisse les choses se faire d’elles-mêmes, des micros villages se créent naturellement au sein du village. L’organisation émerge sans organisation.

Les hubs participent à créer du lien autour de besoins universels, ils jouent le rôle du plan d’eau dans la savane où toutes les espèces viennent s’abreuver dans un climat de paix.

Depuis un an que l’Oasis est ouvert, j’ai vu passer plein de gens au profil très différent. Il y a ceux qui déjà équipés, ont simplement choisi un spot pour y déposer leur maison mobile.

Pour habiter à OneLab, l’autonomie vis-à-vis de l’eau et de l’électricité est indispensable. Seul le centre du village où se trouvent l’université et les ateliers partagés est raccordé aux réseaux classiques. D’ici quelques années, la colline sera équipée pour pouvoir s’émanciper des infrastructures centralisées.

Les Hubs sont magiques. Au départ, pas grand monde n’y voyait d’intérêt autre que pratique. C’est tranquillement, par l’usage, qu’ils sont devenus une évidence. Grâce à eux plein de belles âmes ont pu s’installer rapidement sans avoir à se ruiner ou s’endetter sur 20 ans.

Parmi mes premiers voisins, il y a un jeune qui a quitté ses études et adopter la Vie comme sa nouvelle école. Il avait réussi à mettre 2000€ de côté avec lesquels il s’est construit un cabanon isolé de 20 mètres carrés. Il n’y avait presque rien dans sa maison, ni eau courante, ni électricité, simplement un lit, une table et une cuisinière à bois pour avoir chaud et cuisiner. Et tout ce qui lui manquait chez lui se trouvait au hub à 150 mètres de chez lui. Régulièrement, avec sa brouette et ses bidons, il allait chercher de l’eau de pluie et de l’eau filtrée. Il prenait sa douche au hub et y rechargeait son téléphone, son ordi et ses 2 lampes USB.

En 2 semaines top chrono le mec avait un chez lui. Très sommaire certes mais il n’avait déjà plus rien besoin de payer pour y habiter. Et avec les 400 balles de loyer qu’il ne dépensait plus pour vivre dans sa piaule moisie d’étudiant, il s’est offert tranquillement du confort supplémentaire, en commençant par investir dans une cuve et une gouttière.

En découvrant pour la première fois de sa vie qu’il avait 15 heures pleines de disponibles pour lui dans une journée, il s’est lancé dans la peinture. Il récolte les eaux sales issues du nettoyage de ses pinceaux dans un petit bidon qu’il va vider ensuite au Hub dans la phytoépuration. On a parlé hier soir de ses recherches plus approfondies sur le traitement de ce genre de déchets particuliers. Il m’a invité à sa petite présentation d’un nouveau système d’épuration la semaine prochaine à l’université du savoir libre de OneLab.

Pour l’électricité j’ai bien aimé son choix. Finalement il vit très peu chez lui. Son cœur l’appelle tous les jours ou presque à œuvrer à l’espace coworking créatif au centre du village. Tant est si bien qu’avoir un système électrique complet n’est pas sa priorité. Il s’est quand même offert la base de la base en récupérant tout ce qui lui fallait dans une voiture accidentée : batterie, câbles, fusibles et même l’autoradio. Il a simplement investi quelques euros supplémentaires dans des ampoules et bandeaux de LED pour satisfaire ses envies de lumière.

Tous les 4 jours à peu près, il emmène sa batterie au Hub pour la recharger. Il m’a quand même avoué être à la recherche d’un panneau solaire pour s’épargner ses allers-retours réguliers. J’aime bien ce gars, il n’attend pas que les choses soient parfaites pour commencer et démontre à sa façon que la liberté c’est une simple histoire de volonté.

Il y en a d’autres qui vont encore plus loin dans la simplicité heureuse à OneLab, mais ceux qui refusent le confort ne sont pas la majorité ici. Au contraire, je sens un élan commun d’embrasser les cadeaux offerts par la technologie, en veillant à ne pas en devenir esclave soi-même, ni à réduire d’autres peuples à l’esclavage pour en bénéficier. Toutefois, la souplesse et l’ouverture aux paradoxes est de mise pour bien vivre une telle période de transition. La sagesse appelle à la patiente détermination, on ne peut pas dégommer instantanément des années de contradictions.

Parmi ceux qui s’installent durablement par ici on en trouve qui ont joué bien à fond le jeu de la matrice. Suite à un réveil plus ou moins brutal, ils se retrouvent à un carrefour de leur vie. Se rapprocher de la nature et s’entourer de belles énergies créatives est un appel irrésistible pour ces nombreuses âmes assoiffées du sens qui manque à leur vie. On les retrouve souvent avec une Tiny House, ou un container symbole de leur nouvelle liberté. J’adore la présence de ceux qui après une vie stérile touchent enfin à la magie du vivant. Ils veulent tout faire, tout apprendre et affichent sur leur visage un sourire permanent.

Certains par ici aimeraient bien vivre à temps plein mais sont toujours engagés sur des activités dans la société, ils ont leur petit chalet pour les vacances et les weekends. Il y en a d’autres, qui pour rien au monde n’aimeraient changer le fait d’avoir un pied ancré dans chaque réalité. Je comprends tout à fait, c’était ma stratégie de vie pendant de nombreuses années.

Ainsi cohabitent tous les styles de vie sur un même lieu. Le lien qui nous unit n’est pas philosophique, politique, financier, pratique culturel ou même religieux. C’est un état d’esprit, un amour de l’Amour. Une envie d’être en Vie, et une aspiration à déguster chaque journée comme le nouveau chapitre de notre livre préféré.

Voilà c'est la fin ce deuxième épisode.
Je te souhaite une très belle journée et à bientôt.

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