~AirZome~ chap.1 - Une maison démontable et légère pour les Nomadaires

~AirZome~ chap.1 - Une maison démontable et légère pour les Nomadaires

CHAPITRE #1 - Pourquoi ?

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Un habitat pour les nomades sédentaires ?

Voici le film de ma dernière aventure créative que je réalise épisode par épisode.
Dans ce premier chapitre nous allons explorer la question simple et unique que posent tous les enfants : « POURQUOI ? ».

Tu peux regarder la vidéo ☝️ ou bien lire la transcription ci-dessous 👇
Bonne lecture !

Je suis du peuple des nuages,

Libre, léger, j'aime me laisser guider par les vents, les ailes ouvertes, sans résister.

En tant que nomade, mon chez-moi est un concept abstrait, infini, une sorte de confiance absolue en la vie. Aujourd'hui, c'est aussi un objet. Et bien, qu'est-ce qu'il s'est passé? Pourquoi avoir troqué cette folle et douce liberté contre un grand tas de molécules que l'entropie va décomposer sans relâche chaque journée qui passe? C'est vrai, pourquoi décider cela? Est-ce l'œuvre de l'âge ou de la sagesse? De la lassitude peut-être ou de la paresse? Non, vivre dans mon chez-moi, je le sais, n'a jamais été un but en soi, mais le moyen de m'offrir à ce feu de créativité qui inonde mon plexus solaire.

« Chez » « moi », deux petits mots pour exprimer un concept parfaitement flou. Où commence et où se termine « chez moi » ? Quelles frontières physiques ou abstraites délimitent cet espace où mes cellules enfin se relaxent? La gravité terrestre me maintient confiné dans ce grand jardin partagé en forme de planète. Partout ici, c'est chez nous, chez toi, chez moi. L'eau, l'air, les arbres, les montagnes, la mer, le soleil, le vent, les rivières, sont des cadeaux que Dame Nature offre sans compter à toutes les créatures qui prospèrent. En revanche, l'humanité en pleine adolescence préfère s'amuser à détourner l'abondance pour simuler le manque et la rareté.

Je suis resté sans domicile fixe, parfois même sans domicile mobile. Le goût de l'aventure et du voyage m'ont toujours poussé à aller voir ailleurs si j'y suis. En vérité, ça m'arrangeait bien de bouger, car la sédentarité n'est pas gratuite.

Moi, qui suis né sur Terre, je n'ai pas d'autre choix que de vivre quelque part, n'est-ce pas ?

Pourtant, il est interdit de choisir un endroit et d'y rester, à moins de demander l'autorisation et bien sûr de payer. Avec le temps, la Terre, notre bien commun, est devenu un paradis privé.

Nomade ou Sédentaire ?

Suis-je le seul en galère sur cette question? C'est pas un peu trop binaire, non? Je me dis souvent qu'il manque une option, une troisième branche dans la classification.

Je les appelle les Nomadaires

Ceux qui désirent s'ancrer tout en restant léger.

Il s'agirait d'un peuple hybride qui choisit le meilleur des deux mondes, des êtres libres de jouir de la stabilité d'une maison tout en s'autorisant à la déplacer en fonction des années ou des saisons. À quoi ressemblerait l'habitat d'un Nomadaire ? Un logement transportable, bien sûr, qui nous ancre à la surface de la Terre sans nous couler les pieds dans le béton.

Il s'est passé 21 pleines lunes entre la décision de fabriquer moi-même l'habitat qui me ressemble et la première nuit passée dedans. C'est à la fois très court quand on invente tout à partir d'une page blanche, et très long lorsqu'on est pressé de vivre enfin chez soi. Alors pourquoi ne pas avoir directement loué ou acheté un habitat existant? Ainsi j'aurais pu tout de suite profiter d'un espace juste à moi.

Eh bien, ça aurait pu être un choix parfaitement valable. C'est d'ailleurs ce qu'a fait Boniface Junior, le fils aîné de M. Fichier. Son histoire est précieuse à écouter.


Histoire de Boniface Junior Fichier

Bonjour, je suis Boniface Junior. Je finissais tout juste mes études en gestion administrative quand j'ai décidé qu'il était temps pour moi de quitter le nid familial. Mon père, M. Fichier, m'a donné 10 000 euros. Ça me paraissait vraiment beaucoup.

« Mais c'est pour bien démarrer dans ta vie », m'a-t-il dit.

À l'époque, je ne gagnais pas encore ma vie. Un hippie dans la rue m'a dit un jour que je l'avais même perdu pendant 20 ans. Je n'ai pas compris ce qu'il voulait dire. Moi au moins, j'avais un diplôme recherché sur le marché de l'emploi. Non mais oh oh oh!

J'étais motivé à l'idée d'être propriétaire comme papa. Mais avec 10k€ de capital, l'agent immobilier ne m'a proposé qu'une place de parking à acheter. Alors j'ai cherché une location. « Votre dossier n'est pas satisfaisant », m'a-t-on répondu. Pourtant mes parents se portent garant et ils ont un taux d'endettement maîtrisé, parole de Fichier.

« Vous devez trouver un travail fixe », m'a-t-on ajouté. Alors je suis parti à la recherche d'un poste d'employé dans le domaine de l'archivage documentaire, une passion qui se transmet de père en fils.

Pistonné par mon père, élu premier papelliste de France en 1991, j'ai trouvé rapidement un travail. Seulement, pour me rendre au boulot, il me fallait une voiture. Pour en conduire une, il me fallait d'abord avoir le permis de conduire. Pour décrocher ce permis de conduire on m'a demandé de passer le code. Et pour obtenir tout ça dans l'ordre, il me fallait du temps et de l'argent. Par chance, cette longue cascade de pré-requis s'est arrêtée ici grâce aux 10 000 euros de mon cher papa. Sans cet argent, je ne sais pas comment j'aurais fait.

Ça me coûtera 2 000 euros de passer le code et le permis de conduire, puis je vais payer 5 000 euros pour une Renault Modus d'occasion couleur beigeâtre avec poignée de boîte à gants chromée. Ma période d'essai finie, je décroche du premier coup un CDI. Mes amis étaient vers de jalousie. Mes supérieurs ont apprécié ma cadence sportive en feuilletage multi-feuilles. Ils m'ont également félicité pour le dosage précis de la quantité de salive nécessaire pour faire chanter le papier lors d'une technique de glisser-pincer. Un secret fièrement gardé par la famille Fichier.

Pour 600 euros par mois sans les charges, je peux enfin être chez moi. C'est un appartement au rez-de-chaussée d'une grande barre de logement à 30 minutes en voiture du travail. Emplacement idéal, juste à côté de la voie express et du Super U.


Bon, je t'avoue, cette histoire me déprime. Heureusement que Boniface Junior n'existe pas vraiment. D'ailleurs, toute ressemblance avec une vie existante serait fortuite, évidemment. Dans cette histoire, Boniface s'est donné à fond pour obtenir une bonne situation. De son plein gré, il avance désormais sur les rails d'un train-train quotidien.

Comme prévu, sa vie se déroule maintenant sans surprise, à vitesse constante. Aux yeux de son employeur, de son banquier, du percepteur et des marchés financiers, notre ami est devenu un citoyen de haute qualité. Une sorte de vache à lait tout en bas de la chaîne financière qu'on peut pomper par tous les côtés.

Après avoir payé le code, le permis, la bagnole, l'essence, la caution, les assurances, il est enfin chez lui. Bon, pas tout à fait. Ce privilège n'a rien d'acquis, en fait. Pour continuer à vivre chez lui, il doit payer par mois 600 balles de loyer ainsi qu'une myriade d'abonnements. Eau, gaz, électricité, poubelle, forfait téléphone, internet et taxes d'habitation.

Désormais, il ne peut plus s'arrêter de travailler, au risque de se retrouver à la rue. Il est devenu l'esclave d'un revenu régulier.

L'Histoire de Blanchette

J'aimerais, si tu l'acceptes, te faire écouter une autre histoire. Celle de Blanchette, une biquette un peu moins docile que la moyenne. Tout comme Boniface Fichier, elle s'est retrouvée un moment de sa vie à chercher son chez elle. Elle aussi avait 10 000 euros de côté. Comment va-t-elle s'y prendre? C'est ce qu'on va découvrir en écoutant son récit.


Bonjour, je suis Blanchette. Pour moi, l'école a vraiment commencé le jour où j'ai quitté l'université. Partir en voyage m'a enseigné ce dont personne ne m'avait jamais parlé. Le monde est immense, la vie est généreuse, les gens sont gentils et accueillants. Tout devient abondance lorsqu'on nettoie les yeux derrière les yeux.

Jeune, curieuse, je parcours la terre, possède peu de choses et je ne manque jamais de rien. Absolument tout mon temps de vie m'appartient. Je l'utilise pour apprendre, comprendre, partager, grandir et rencontrer l'univers de mes voisins qui vivent partout sur Terre. Je suis dans la catégorie des sans domicile fixe. Pourtant, je n'ai jamais été obligée de passer une seule nuit allongée sur un carton, à part pour tester la sensation.

Dormir dans la nature, franchement, c'est le luxe ultime. Mais ce privilège se transforme en punition à la froide saison. Ma stratégie pour passer l'hiver au chaud est d'échanger directement un peu de mon temps de vie contre un lit, une chambre, voire même carrément une maison. Ce type d'échange est naturel et se déroule sans intermédiaire financier. J'ai besoin d'un espace, quelqu'un a besoin d'aide ou de compagnie. Le deal est simple, direct. La monnaie utilisée est le bon sens, le temps et la confiance.

Les années passent et l'absence de chez moi me lasse. À cette époque, j'ai une réserve de 10 000 euros qui peut se transformer en camion aménagé, mais je ne le sens pas trop. Un véhicule roulant est trop mobile pour me sentir vraiment ancrée. Et j'ai envie d'un minimum d'espace pour accueillir mon atelier. On me conseille de trouver une yourte. C'est ultra léger et en plus ça passe dans mon budget, mais j'entends « bof » à l'intérieur de moi.

Un jour, je rencontre enfin un concept d'habitat qui fait vibrer mes chakras. Il s'agit d'une cellule toute légère qui peut se monter et se démonter en l'espace d'une journée. Alors je me lance ! Il me faudra 3 mois seulement pour fabriquer les blocs de mon chez moi. J'ai déjà trouvé le coin de forêt où assembler cette maison en forme de joyau.

Dès le premier jour, la maison est branchée sur l'abondance du vivant. Elle récolte du chaud, de l'eau et de l'électricité. Aucune facture à payer, ça me plaît. Mais le plus important est d'avoir conservé le pouvoir de me lever chaque matin libre de décider à quoi ou à qui offrir mon temps.

Régulièrement, je pars chercher un peu d'argent pour offrir quelques mises à jour à ma maison. Un sauna solaire par exemple ou une vitre panoramique pour voir les étoiles depuis mon lit. Quelques années plus tard, je me sens appelée à vivre autre part. Je déménage et ma cellule aussi. Il suffit simplement d'une journée pour la démonter, d'une voiture et d'une remorque pour la transporter. De mon passage, il ne restera que peu de traces, seulement quelques chemins et des plantations.

J'ai rencontré un amoureux et nous souhaitons vivre proches l'un de l'autre en conservant notre indépendance. Il a déjà une cabane, c'est parfait. On décide de monter la mienne juste à côté. Les années passent, la famille s'agrandit et du coup la maison aussi. Elle ressemble à une grappe de raisin maintenant, avec une grande cellule au centre qui nous rassemble dans une pièce commune.

Un jour, nos petits biquets deviennent grands. Chacun leur tour, ils demandent une petite cabane indépendante que l'on construit tous ensemble. Ils s'émanciperont à leur rythme et un jour quitteront leur nid avec leur cellule facile à déplacer. Notre maison s'était agrandie pour eux, aujourd'hui elle se rétrécit. C'est un habitat vivant, une maison organique.


Merci à Blanchette, notre biquette imaginaire, d'avoir exploré ce chemin de traverse qui deviendra peut-être un jour la norme. Qui sait?

Réflexions Finales

Moi, Sylvain, j'ai une croyance qui perdure. Celle que l'architecture a un impact fondamental sur nos vies et nos relations. Le logement que nous choisissons peut ouvrir une ligne de temps qui ressemble par exemple à la vie de Blanchette ou celle de Boniface Fichier. Deux paradigmes parmi tant d'autres à explorer dont les conséquences sont si différentes à assumer.

L'architecture ne concerne pas exclusivement la beauté ou l'ergonomie. Car même la maison la plus belle et la mieux foutue du monde est une erreur si elle implique qu'on se transforme en esclave pour s'acheter le droit d'y rester.

As-tu déjà vu cette image du cheval accroché par une corde à une chaise en plastique? Nous sommes d'accord, c'est ni la corde ni la chaise qui retient l'animal à brouter les quelques brins d'herbe qui le piétinent. Non, ce qui retient le cheval de bouger est plutôt une croyance, un conditionnement méthodiquement intégré.

Sa nature profonde est d'être fort et libre.
Il a juste oublié.

Pourquoi tant de gens se lèvent chaque jour à contre-cœur pour un bullshit job qui leur permet simplement de survivre et recommencer pareil le mois suivant ?
Quel est le sens de tout ça ?

En vérité, le principal coût d'un chez-soi n'est pas financier. Il se mesure plutôt en temps de vie et en énergie consacrée à gagner son revenu.

Qui sur terre a décidé qu'un endroit au chaud et au sec devait coûter 25 à 40 années de servitude envers un système marchand à l'envers ? Nos maisons lourdes, rectangulaires, dépendantes, immobiles et chères sont à l'image de notre mode de vie. En s'y prenant différemment, une voire deux années grand max de salaire suffisent pour se construire un nid douillet.

Dans le catalogue des possibles, il manquait la maison de Blanchette, facile à vivre, à fabriquer et transporter. Alors j'ai décidé de l'inventer. Pour moi d'abord ! Pas bête la bête ;-) Et ensuite pour l'offrir à toutes celles et ceux qui gagneraient à savoir qu'il est possible d'habiter un endroit confortable sans sacrifier sa liberté.

TO BE CONTINUED...

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